Industrie Aéronautique Russe : blocage US du projet MC-21 qui concurrence les modèles A320 et B737, les plus vendus par Airbus et Boeing

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Aéro-News (projet MC-21) – Coup dur symbolique pour la Russie dans sa bataille contre les sanctions: son programme d’avion moyen-courrier MC-21, majeur pour son industrie aéronautique, est retardé d’un an à cause des mesures punitives des Etats-Unis.

Une décennie après le premier lancement d’un appareil civil depuis la chute de l’URSS avec l’avion régional Superjet, le projet MC-21 s’attaque à un marché bien plus gros puisqu’il concurrence les modèles les plus vendus d’Airbus et Boeing, l’A320 et le B737.

« Etant donné que les Américains ont cessé de fournir des matériaux composites, nous passons à nos propres matériaux », a déclaré Sergueï Tchémézov, patron du conglomérat d’Etat militaro-industriel Rostec, aux journalistes présents au salon international de la défense (Idex)à Abou Dhabi.

« La production en série est décalée d’un an » et doit désormais commencer d’ici fin 2020 au lieu de cette année comme prévu, a-t-il affirmé, indiquant que le conglomérat nucléaire russe Rosatom a créé « un matériau qui pourrait bien remplacer l’américain ».

Le MC-21, qui a effectué son premier vol d’essai en mai 2017, devait initialement être mis en service fin 2018. Mais il a déjà été repoussé.

L’avionneur UAC, en charge du projet au sein de Rostec, avait déjà annoncé en janvier que les composants américains seraient remplacés par des produits russes, assurant que les sanctions ne compromettraient pas le projet.

Depuis la crise ukrainienne de 2014 et l’intensification des tensions internationales, les sanctions occidentales, et surtout américaines, ne cessent de se renforcer contre l’économie russe, et en particulier contre son industrie de défense.

En septembre, Washington a ajouté à sa liste noire des entreprises russes participant au projet MC-21 – dont Aerocomposite – au motif qu’elles agissent « contre les intérêts des États-Unis en matière de sécurité nationale ou de politique étrangère ».

Outre les mesures sectorielles, les sanctions visent Rostec et nommément son influent patron, Sergueï Tchémézov, réputé proche de Vladimir Poutine.

Le MC-21, qui peut transporter jusqu’à 211 passagers, doit constituer un nouveau symbole de renaissance de l’industrie aéronautique russe après le chaos des années 1990.

« Nous sommes prêts à concurrencer Boeing et Airbus sur le marché mondial de l’aviation », affirmait Sergueï Tchémézov dans un entretien à l’AFP en novembre.

Son fabricant, Irkout, promet un « nouveau niveau de confort » pour les passagers et a indiqué avoir signé des contrats avec des compagnies aériennes russes et dans l’ex-URSS, telles qu’Aeroflot, UTAir et la compagnie aérienne kyrgyze.

Moteur américain !

M. Tchémézov a par ailleurs indiqué lundi que, selon un contrat signé avant l’imposition des sanctions, le premier lot de 50 à 60 avions serait équipé de moteurs américains.

« Nous étions contre car nous avons notre propre moteur », a-t-il précisé. « Mais en vertu du contrat, nous sommes obligés de prendre leurs moteurs pour le premier lot ».

Ce démarrage difficile du MC-21 rappelle la mise en service en 2011 de l’appareil de transport régional Superjet 100, premier avion civil conçu après l’ère soviétique. Mais cet avion assemblé avec de nombreuses pièces occidentales, source de fierté à l’époque de son lancement, a connu un succès limité au-delà de la Russie.

Depuis, fin 2018, Rostec, puissant conglomérat, a récupéré dans son giron United Aircraft Corporation (UAC), qui rassemble les principaux avionneurs civils et militaires russes (Soukhoï, Antonov, Tupolev).

« Nous procédons actuellement à un audit de la société (UAC), cela ne donne pas une très bonne impression. Il y a besoin d’environ 240-250 milliards de roubles supplémentaires » pour le projet MC-21 mais aussi pour moderniser les installations existantes, a déclaré lundi M. Tchémézov.

Il a indiqué que Rostec allait « très probablement » séparer les divisions civile et militaire d’UAC, « afin de ne pas exposer la production civile à des sanctions », particulièrement dures contre le secteur de la Défense.